Le Raid28 : une légende à part dans le monde de l’ultra, course nocturne à cheval sur les départements 28, 78 et 91, par équipe de 5 en orientation et en autonomie totale, le tout sur une distance annoncée à 85 km cette année (à boucler en 18h maximum). Le site officiel vous en apprendra plus…
Sommaire :
Avant-course
Présentation
Depuis plusieurs mois nous avons constitué au boulot une équipe sans autre prétention que celle de « finir la course à 5 dans les temps », ce qui serait déjà un bel exploit dans la mesure où nous cumulons les principaux défauts qu’il faudrait ne pas avoir quand on s’attaque à ce genre de course :
- on ne se connaît qu’à peine, c’est tout juste si on a réussi à se réunir tous les 5 pour un apéro fin novembre, le temps de boucler le dossier administratif
- on n’a même pas réussi à courir ensemble une seule fois, même pour faire semblant
- notre orienteur, en l’occurrence orienteuse, n’a que deux mois d’expérience (durant lesquels elle a certes fait un travail très sérieux)
- seul un membre de l’équipe a une expérience de ce genre d’épreuve puisqu’il était de la partie l’année dernière. Du coup on l’a nommé de force capitaine.
Présentation de l’équipe :
- Claude est le capitaine, donc il ne fait rien d’autre que tout décider
- Véro oriente seule, de toute façon personne d’autre n’en est capable (à la rigueur Claude qui a peut-être quelques souvenirs de sa jeunesse)
- Fred gère le raudebouque et distille des infos sur les balises lorsqu’on les approche
- Théo et Boubou jardinent lorsqu’on arrive sur site, Boubou fournissant en plus des infos sur les distances entre les balises
Entre l’apéro d’inscription (à 5) et deux repas à la cantine dans les semaines précédant la course (à 4) on a mis en place une stratégie d’enfer qui ne peut que nous mener à notre but :
- Sachant qu’on ne part pas avec toutes les chances de notre côté, on abandonne dès le début les balises bleues (à bonus) pour se concentrer sur les vertes (à pénalités),
- Si à l’approche d’une barrière horaire les délais deviennent trop justes on privilégie la barrière sur les balises, i.e. en cas de besoin on laisse (temporairement) tomber les balises vertes également.
- à la remise du raudebouque on reportera dans le gymnase (en espérant que ce ne soit pas dehors) les balises (vertes donc, pour ceux qui sont déjà perdus) jusqu’à la première barrière,
- On ne se chargera pas trop en eau sachant qu’on peut faire le plein à un point d’eau sur le parcours (à 28 minutes les 8 litres ça vaut le coup de s’alléger d’1,5L au départ).
Logistique
Contenu du sac :
à grignoter en continu | 2 sachets salés : comté (105 g) & saucisson (100 g) | 205 g |
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2 sachets sucrés : abricots (10) & figues (8) | 260 g | |
boissons | 2 L d’eau à 45 g/L de poudre énergétique | 2 kg |
1 sachet de poudre pour 2 L d’eau | 115 g | |
gourde d’1 L d’eau pure | 1 kg | |
thermos d’1/2 L de café | 780 g | |
flasque de 12 cl de vieux calvados | 220 g | |
à manger lors de ‘vraies’ pauses | 8 mini-sandwichs (~8cm, ~60g) à partir d’1 baguette : | 440 g |
3 sachets salés (1 sandwich jambon/beurre + 1 fromage) | ||
1 sachet sucré (1 sandwich chocolat + 1 nutella) | ||
réserve de secours | 3 barres de céréales | 75 g |
3 gels | 75 g | |
poids total du sac (y compris vêtements & pharmacie) | 7,0 kg |
Entraînement
Ben… pas grand chose depuis l’Origole ! Quand même quelques sorties longues avec sac à dos super-chargé (cf. mi-déc. et début jan.), mais tout repose surtout sur ce qu’il reste des derniers mois…
Récit
Avant-course
Rendez-vous à Bures à 17h, d’où Jacquouille fera l’aller-retour jusqu’à Dreux pour nous déposer puis laisser le véhicule à l’arrivée. A 17h15 tout le monde est là et on embarque sous une météo capricieuse (alternance d’averses et accalmies). Arrivée au gymnase de Vernouillet à 18h20 où on se réserve un coin où s’installer et se préparer tranquillement.
Jusqu’à 21h30 chacun s’affaire à s’habiller, se restaurer via la pastamobile et les cakes de Véro (jambon & safran), se badigeonner de crème protectrice les pieds et autres recoins stratégiques, vider et refaire une dizaine de fois son sac.
Personnellement j’opte définitivement pour une tenue assez légère : collants légers en bas et 2 couches en haut : 1 maillot technique léger à manches longues par-dessus lequel je porterai le coupe-vent durant la nuit. J’ai en réserve au fond du sac un t-shirt léger et un maillot à manches longues épais.
Les plus connus en profitent également pour saluer leurs anciens compagnons de galère ; pour ma part je connais Vivi et Etienne du CIVC, la première faisant partie de l’équipe du Bagnard et le second n’étant venu là que pour l’ambiance, et 2 ou 3 têtes croisées à l’Origole. Je fais également connaissance avec la fameuse Murielle et le non moins fameux Stéphane.
On passe rapidement au contrôle des sacs (j’écope du bracelet orange) et à la photo officielle :
La tension monte progressivement à mesure que chacun se sent prêt et voit les dernières minutes défiler doucement. Heureusement Papy Turoom est là pour haranguer la foule au micro ou passer dans les rangs (a-t’on déjà vu un organisateur rester aussi disponible à quelques minutes du départ ?), un caméraman aussi s’invite dans les derniers secrets de préparations pour immortaliser ces instants fugaces.
Pendant ce temps-là les allers-retours dehors (à la pastamobile, au camion-consigne ou simplement pour passer le temps) permettent de constater que le temps est toujours aussi indécis (alternances d’averses et accalmies, température ~4°C).
Départ
Après un rapide briefing dont le clou reste l’annonce de la possibilité de finir le parcours en RER (on apprendra plus tard sur le forum que c’est en raison d’un rallongement du parcours (plus de 100km en suivant toutes les balises au lieu de 85 annoncés) que cette divine astuce a été mise en place). A 22h tapantes le top-départ est donné et Claude s’élance pour récupérer notre raudebouque.
En tant qu’assistant raudebouque je dicte les définitions de balise à Véro qui les reporte sur ses cartes. On défile comme cela jusqu’à la première barrière horaire (km 54, à rejoindre avant 10h) et on repart en bonne position au bout de 35 minutes de report
Dehors il ne pleut plus, mais le coupe-vent est le bienvenu vu la fraîcheur ambiante. Première orientation critique : sur quelle route se trouve-t’on ? Véro se repère rapidement et on part en trottinant avec quelques équipes alentours. On progresse bien de balise en balise pour arriver à un premier point bloquant au km 15 ; là une erreur de lecture de la carte nous force à un peu de jardinage autour d’une ligne à haute tension, puis sans doute un mauvais azimut nous entraîne avec une autre équipe pour un petit détour. A force de réflexion en plein vent glacial (alors que 20m plus loin on était à l’abri !) Véro et Claude retrouvent la donne direction et on repart en direction des éoliennes où on se retrouve seuls suite à un choix de parcours.

au pied des éoliennes photo Raid28
Arrivés au km 20 (entrée de Villemeux-sur-Eure) on se fait une pause ravito à l’abri du vent ; le café est froid mais un peu de solide fait du bien.
Milieu de la nuit
Jusqu’ici tout le monde va bien ; on baisse un peu d’allure mais c’est surtout parce qu’on était partis un peu vite. Peu à peu en rentrant dans la forêt les conditions se dégradent : passages dans des congères qui masquent parfois des flaques où on s’enfonce copieusement, petites couches de neige gelée où on teste son équilibre à chaque appui, sol humide voire boueux et par moment remplacé par une rivière ! Par endroits il n’est même plus nécessaire de faire attention où on met les pieds, ces derniers étant tellement imbibés qu’ils ne craignent plus rien…

ceci est un chemin (si si !) photo Raid28
Heureusement il ne pleut plus, le haut du corps reste sec.
Vers 4h30 du matin je me prends un gros coup de barre, je n’ai qu’une envie : celle de dormir et il faut lutter pour suivre le groupe. Au bout de quelques dizaines de minutes ça va mieux et la pause ravito suivante (entrée de Saint Lucien) finit de me réveiller.
Matin
Alors que le jour pointe doucement on déambule toujours dans la forêt, et les frontales deviennent de plus en plus superflues. En entrée de la forêt de Rambouillet il devient possible de tout éteindre alors qu’on emprunte des chemins de sable.
Au km 52 on s’arrête pour faire le plein d’eau au niveau du Poigny La Forêt, mais en sortant les poches de chacun on constate qu’en fait presque personne n’a beaucoup bu jusqu’à présent, et on aurait pu tenir jusqu’au bout à ce rythme… tant pis pour les 28′, on n’est pas à ça près !
Peu après on croise le parcours de la troisième boucle de l’Origole au niveau de l’étang du coupe-gorge, qui annonce la première barrière horaire.
Sur un coup de chance on trouve une balise bleue (type mémory) avec Théo, c’est toujours ça de pris, et en sortant de la forêt on tombe sur le PC9 au-dessus de la RN10.
Pendant que tout le monde se restaure au soleil qui nous réchauffe timidement de ses doux rayons, Claude reporte les prochaines balises sous ma dictée.
Aprsè 25 minutes d’arrêt on repart le mords aux dents, d’autant plus que le parcours suit sur quelques km une piste cyclable goudronnée et que les autres équipes n’avancent par très vite et ça motive de doubler du monde ! Il faut cependant reprendre un rythme plus tranquille, Théo étant à son tour à plat. On enchaîne les balises sans difficultés jusqu’au drame…
A proximité du PC12 deux balises sont situées sur un crochet du parcours, aussi Claude et moi étant toujours d’attaque et dans la mesure où j’ai avec moi la carte IGN du coin et que tout le monde n’est plus en grande forme, on propose d’aller les chercher tous les deux pendant que le reste de la troupe avance au plus court, avec rendez-vous au PC. On bifurque donc pour pointer la prochaine balise, puis on jardine quelques minutes sur la suivante sans la trouver, et on file au PC pour retrouver tout le monde… sauf qu’au PC il n’y a personne ! Enfin il y a les contrôleurs, mais pas trace de nos coéquipiers. On attend quelques minutes puis trouvant le temps long on essaye le téléphone pour apprendre qu’ils se sont perdus un peu plus tôt ! Il n’y a alors rien d’autre à faire qu’à les attendre en voyant défiler les autres équipes. Au bout de 45 minutes ils surgissent en dernière position après avoir fait un bonus de 3~4 km qui aura fini d’achever Théo.
Après-midi
On confie donc Théo aux contrôleurs qui vont le rappatrier et on repart au plus vite (i.e. en marchant) en direction du prochain PC, étant entendu qu’on n’a plus le temps de suivre le tracé de balises en balises.
Les trois prochaines heures vont donc défiler très lentement, à suivre le chemin le plus court de PC en PC entre les Vaux de Cernay, Choisel puis la gare de St Rémy. Heureusement quelques rencontres inattendues vont rompre un peu la monotonie, croisant Philippe qui s’entraîne dans la forêt des Vaux, puis avant Chevreuse la petite famille de Véro qui fait un bout de chemin avec nous (ses gamins qui nous suivent sans problème… c’est dire notre train d’enfer !).
A 1-2 km de St Rémy l’équipe de la bouteille nous rattrape dans un sprint haletant et on s’accompagne les uns les autres jusqu’au PC au bord de l’étang de Beauséjour, où Claude et moi quittons de nouveau le groupe pour pointer la dernière balise située de l’autre côté de la pièce d’eau, cette fois-ci sans dommage…
La barrière horaire ayant été repoussée suite à un rallongement officiel du parcours dans la forêt du Perray, on est juste dans les temps et évidemment on préfère continuer via le RER plutôt que d’abandonner via le bus ! On retrouve donc à la gare Mamy turoom qui distribue les tickets et on se laisse porter jusqu’à Bures à une vitesse encore jamais atteinte…
Arrivée
Le plus dur reste presque à faire, en devant se lever de nos places en gare de Bures ! Heureusement que la gare est en hauteur par rapport à la fac, ça permet de limiter la casse jusqu’au gymnase, mais pour autant on se traîne plus qu’on ne court sur ces derniers 500m. Une fois traversée l’Yvette ne reste plus que 100m à déchirer la foule en liesse pour franchir la ligne d’arrivée et se voire offrir un bol de soupe ô combien appréciable !
Je retrouve les deux équipes des CIVC qui ont assuré sur le semiRaid (3èmes et 5èmes) et le reste n’est qu’une longue agonie, chaque mouvement coûtant son pesant de grincements et autres douleurs, que ce soit pour quitter ses chaussures (enfin ce qu’il en reste) à l’entrée du gymnase, pour se déhabiller en vue d’une bonne douche chaude, pour s’assoir à table puis se relever ou enfin sous les mains de l’osthéo qui m’a remis en place plus de morceaux que je ne saurais me remémorer !
Bilan
Parcours
Visualisation du début du parcours (jusqu’à midi, enregistré par mon GPS) sur Openrunner.
Visualisation du parcours complet (y compris RER, enregistré par le GPS de Véro) :
Bilan collectif
Un grand bravo à tout le monde. Nos échanges d’après-course ont souligné la complémentarité du groupe, chacun ayant tenu son rôle qu’il soit technique ou psychologique, et sauf oubli de ma part les mots les plus hauts que l’on ait eu en course n’étaient que de petits reproches vites oubliés…
On peut d’ores et déjà se faire une cérémonie des panards en toute intimité :
- panard des moisissures : Théo
- panard du bruit de fond : Boubou
- panard du cake au safran : Véro
- panard de l’azimut : Claude
Bilan personnel
Au final mes impressions sont mitigées ; mais relativisons cependant : comme d’habitude dans ce genre de situation je me concentre toujours en premier lieu sur les points négatifs pour revenir plus tard aux positifs.
Certes domine la satisfaction 1- d’avoir collectivement bien géré cette épreuve, 2- d’en sortir entiers (même si Véro et Théo auront peut-être besoin de qqs jours ou semaines pour réparer ses pieds/son genou) et 3- d’avoir participé à cette superbe aventure qu’est le Raid28… (et une pensée pour l’équipe Turoom, même si j’aurais préféré un T-Shirt marqué ‘Raid28’ et non SemiRaid !).
Mais à l’instar de certain collègue j’ai trouvé cette sortie longue un peu trop longue par manque « d’activité » durant la progression. Pour une première c’était sans doute inévitable et j’imagine que ça se travaille et que la question ne se pose pas chez les équipes rodées. D’un point de vue personnel cette longueur m’a également rappelé mes limites en terme de sociabilité… ça c’est plus difficile à corriger !
En tout cas et ce sera mon dernier mot, par rapport à toutes les mises en garde, voir échecs annoncés, que j’ai entendus lorsque j’ai dit que j’allais sur le Raid28 avec des (quasi-) inconnus, soit les gens se font une montagne de pas grand chose, soit on a un potentiel monstrueux ! Réponse en 2011 ?
Ils sont fous ces gaulois !
Et dire qu’ils en redemandent….
Bises au valeureux baroudeur.
Il faudra que tu m’expliques ce qu’est un raudebouque… J’avoue mon inculture !
Encore bravo pour tous ces efforts !
Profitant d’un moment de relâchement de Mimine sur l’ordinateur, je voudrais te dire 2 choses :
– ton père était maso mais moins que toi
– c’est quoi « tes limites en terme de sociabilité »?